Tribune de Genève, mercredi 13 septembre 2017
Tribune de Genève, mercredi 13 septembre 2017
Page 17
Pour défendre son concept, il se bat contre Apple
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Pour défendre son concept, il se bat contre Apple
LitigeL’antiquaire Jules Petroz est aux prises avec le géant américain pour une histoire de propriété intellectuelle.
Apple Inc. s’est opposé au dépôt de la marque Apple Boutique par le Genevois Jules Petroz. L’antiquaire plaide que ce nom fait référence à la boutique des Beatles de 1967 et non à la multinationale américaine.
Apple Inc. s’est opposé au dépôt de la marque Apple Boutique par le Genevois Jules Petroz. L’antiquaire plaide que ce nom fait référence à la boutique des Beatles de 1967 et non à la multinationale américaine.
Image: Laurent Guiraud
Par Anna Vaucher
C’est une petite arcade, 20 m2 tout au plus, devant laquelle trône une charrette en fer forgé remplie de livres aux pages jaunies. Dans la vitrine d’Apple Boutique, au 1, rue de l’Ecole-de-Médecine, un tableau pop surmonte des masques africains et quelques bijoux de perles entourent une minuscule statue. Jules Petroz, 56 ans, est antiquaire de père en fils et papa de deux filles; un petit commerçant comme il en existe tant d’autres à Genève. Pourtant, le combat qui l’oppose à un géant n’a rien d’ordinaire. Son Goliath à lui, c’est Apple Inc., la multinationale qui pèse plus de 800 milliards de dollars, avec qui il est aux prises depuis mars dernier pour une histoire de propriété intellectuelle.
Il y a quelques années, alors que les affaires sont à la peine – la concurrence des maisons de ventes aux enchères en ligne est rude – il réfléchit à un nouveau concept pour vendre ses objets sur Internet. Et décide de reprendre une arcade – «Pour acheter sur le Web, les gens ont besoin, pour se rassurer, de voir que vous avez une adresse physique.» Son idée? «Créer un magasin, un peu comme un musée, avec des objets d’art et des produits dérivés. Si vous n’avez pas les moyens de vous offrir le tableau qui vous plaît, vous pouvez acheter le t-shirt ou la tasse avec sa reproduction. Il s’agit d’allier le côté déco, antiquités traditionnelles, objets souvenirs et vintage.»
Un concept, c’est bien, mais encore faut-il un nom. Il pense très rapidement à Apple Boutique, avec un logo dont les lettres rouges ultrasixties se lisent dans une pomme. «La référence n’a aucun lien avec la multinationale américaine, dont j’apprécie par ailleurs les objets», précise-t-il en pointant du doigt son écran géant posé sur une belle table ancienne.
Son modèle à lui, c’est les Beatles et leur boutique Apple, «populairement appelée Apple Boutique». Ouverte en 1967 en grande pompe à Baker Street, à Londres, elle fermera quelques mois plus tard en raison d’une gestion pour le moins folklorique. «C’est un hommage au groupe et à la période hippie de mon enfance. Paul McCartney définissait sa boutique comme un bel endroit où de belles personnes pourraient acheter de belles choses. J’aime beaucoup cette idée.»
Jules Petroz achète le nom de domaine (www.appleboutique.com), qui s’avérait être libre. S’inscrit au Registre du commerce. «Mais en vendant en ligne, je me suis dit que j’allais dépasser le cadre de la Suisse. J’ai donc décidé de déposer ma marque auprès de l’Institut fédéral de la propriété intellectuelle (IPI).» Le dépôt est validé, la décision publiée.
C’était compter sans l’opposition d’Apple Inc., qui dans le délai imposé de trois mois décide de recourir. Dans son courrier daté du 8 mars 2017, la renommée étude Lenz & Staehelin relève que la marque déposée Apple et son logo sont très similaires à ceux d’Apple Boutique et que l’antiquaire genevois ne pouvait pas l’ignorer.
S’il ne peut commenter une procédure en cours, l’IPI explique pour sa part que pour marquer son opposition, «une marque doit être antérieure et protégée pour des services identiques».
Or, pour Me Nathalie Karam, avocate de Jules Petroz, les secteurs visés par son client (objets de brocante, tableaux, livres, vêtements…) n’ont rien à voir avec ceux d’Apple Inc. «Mon client est un petit antiquaire passionné. Son but n’est pas d’ouvrir des boutiques à la chaîne. J’ai appelé l’avocat d’Apple Inc. à de nombreuses reprises pour en discuter, mais il n’a pas donné suite. Nous avons maintenant jusqu’au 15 septembre pour fournir un mémoire avec nos arguments. Je suppose que mon confrère veut le consulter avant d’entrer éventuellement en négociation.» En cas de poursuite de la procédure, il reviendra à l’IPI de trancher. Le perdant pourra alors saisir le Tribunal administratif fédéral.
Partage du gâteau
Si ses moyens sont limités, le petit antiquaire passionné veut croire à sa chance: «Apple Boutique n’a jamais été la propriété de personne, souligne Jules Petroz. Je ne vois pas en quoi on peut me reprocher d’appeler mon magasin comme on surnommait celui des Beatles il y a cinquante ans. Je veux juste qu’on me laisse ma petite arcade, qui ne fera jamais de mal à Apple.» N’a-t-il pas fait preuve de naïveté en s’avançant sur ce terrain? «Ils ne peuvent pas tout avoir. Nous aussi, on a le droit de vivre.»
L’étude Lenz & Staehelin nous a fait savoir qu’Apple Inc. ne souhaitait pas commenter «cette procédure administrative d’opposition contre l’enregistrement de sa marque par un tiers». (TDG)
Tribune de Genève, Wednesday 13 September 2017
Section: Litigation
Page 17.
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Image
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Apple Inc. opposes the filing of the Apple Boutique brand by Genevan Jules Petroz.
The antiquarian argues that this name refers to the Beatles shop of 1967 and not to the American multinational.
Picture: Laurent Guiraud
To defend his concept, he fights against Apple
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Antiquarian Jules Petroz is struggling with the American giant over a story of intellectual property.
By Anna Vaucher
It is a small arcade, 20 m2 at most, in front of which stands a wrought iron cart filled with books with yellowing pages.
In the shop window of Apple Boutique, at 1, rue de l'Ecole-de-Médecine, a pop painting surmounts African masks and some pearl jewels surround a tiny statue.
Jules Petroz, 56, is an antiquarian, from father to son, and dad of two daughters; a small trader like so many others in Geneva.
Yet a struggle with a giant is not ordinary.
His Goliath is Apple Inc., the multinational corporation that weighs more than 800 billion dollars, with which he has been struggling since last March over a story of intellectual property.
For some years, business has been difficult - competition from online auction houses is tough - he was thinking about a new concept to sell his objects via the Internet.
And decided to open an arcade - "To buy on the web, people need, to reassure themselves, to see that you have a physical address."
His idea? "Create a shop, a bit like a museum, with art objects and their derivatives.
If you cannot afford the painting you like, you can buy the t-shirt or the mug with its reproduction.
It's about combining the decorative side, traditional antiques, memorabilia and vintage objects."
Beatles Reference
A concept is good, but it still needs a name.
He thought very quickly of Apple Boutique, with a logo whose ultra sixties red letters form an apple.
"The reference has no connection with the American multinational, whose objects I appreciate," he indicates, pointing to his giant screen on a beautiful old table.
His own business model references the Beatles and their Apple shop, "popularly known as Apple Boutique".
Opened in 1967 with great pomp in Baker Street, London, it closed a few months later because of management issues.
"It's a tribute to the hippie epoch and iconic group of my childhood.
Paul McCartney defined his shop as a beautiful place where beautiful people could buy beautiful things.
I really like this idea."
Jules Petroz bought the domain name (www.appleboutique.com), which happened to be available.
He registered it with the Commercial Register.
"But by selling online, I figured I was going to go beyond Switzerland.
So I decided to file my trademark with the Federal Institute of Intellectual Property (IPI)."
The deposit is validated, the decision published.
He was counting without opposition from Apple Inc., which within the imposed three-month deadline decided to oppose.
In its letter dated 8 March 2017, the renowned law firm Lenz & Staehelin points out that the Apple trademark and its logo are very similar to those of Apple Boutique and that the Geneva antique dealer could not ignore it.
Though it cannot comment on a procedure in progress, the IPI explains that in order to establish an opposition, "a mark must be older and protected for identical services".
For Nathalie Karam, Jules Petroz's lawyer, the sectors targeted by her client (flea markets, paintings, books, clothing ...) have nothing to do with those of Apple Inc.
"My client is a small passionate antique dealer.
His aim is not to open a chain of shops.
I have called the attorney of Apple Inc. on numerous occasions to discuss this, but he has not replied.
We have until September 15 to provide a brief with our arguments.
I suppose my colleague wants to consult before entering into negotiations."
It will be up to the IPI to decide if the proceedings are to continue.
The loser can then appeal to the Federal Administrative Court.
Cake Sharing
Though his means are limited, the small antique dealer wants to believe in his chances: "Apple Boutique has never been owned by anyone," says Jules Petroz.
I do not see how I can be criticized for naming my shop as it was called by the Beatles fifty years ago.
I just want to be left in my little arcade, which will never hurt Apple.
"Did he not show naivety in advancing along this path ?
"They can not have it all. We too have the right to live."
Lenz & Staehelin informed us that Apple Inc. did not wish to comment on "this administrative procedure of opposition against the registration of a trademark by a third party".
(TDG)